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Projet #1: la coopérative Ankün

 

Analyse d’observation

La coopérative Ankün réunit des productrices de différentes communautés mapuche – communautés indigènes chiliennes – dans la région d’Araucanie au Chili afin de leur permettre de commercialiser à plus grande échelle les produits issus de leurs cultures.

 

La coopérative, créée il y a deux ans, réunit à ce jour 21 productrices de plus de 6 communautés mapuche distinctes. Les produits commercialisés sont des condiments et épices cultivés et transformés de façon traditionnelle par les membres de la coopérative (condiments spéciaux pour la salade, condiments pour la viande, coriandre, persil, « Chasku Â» et Merkén).

 

Le Merkén est le produit phare de la gamme proposée. Il s’agit d’un condiment ancestral, consommé depuis plus de 100 ans dans les communautés mapuche, et dont la production traditionnelle implique un savoir-faire particulier. Aussi, si les proportions des différents ingrédients contenus dans le Merkén peuvent varier entre les différentes communautés (et restent dans tous les cas secrètes), la recette du Merkén traditionnel mapuche est toujours composée de piment « Cacho de cabra Â» (« corne de chèvre Â» en français), de graines de coriandre et de sel.

Bien que les preuves historiques fassent défaut, la légende raconte que le Merkén est né dans les communautés Mapuche, et a notamment permis aux femmes des communautés de résister à l’envahisseur espagnol pendant la colonisation en leur jetant ce mélange pimenté dans les yeux. Aujourd’hui, le Merkén est toujours présent sur la table lors des repas, accompagnant toutes sortes de plats (légumes, viandes, etc.).

 

Le processus de production du Merkén exige un savoir-faire que seules les femmes Mapuche détiennent. En effet, toutes les étapes de production comprises, le procédé dure au total plus d’une année.  Le piment (« aji Â») est d’abord cultivé dans les petits potagers des femmes mapuche. Il s’agit dans la grande majorité des cas de micro-productrices, qui cultivent le piment aux côtés d’autres fruits et légumes (la logique de la monoculture n’existe pas) destinés à la vente souvent locale ou à leur consommation personnelle. Dans le cas du piment, comme des autres produits cultivés, aucun produit chimique n’est ajouté. Bien qu’aucun label ne leur soit octroyé, il est possible de considérer la culture du piment comme étant biologique. Une fois arrivé à maturation, le piment est récolté, puis mis à sécher (de façon naturelle) pendant plusieurs mois. Une fois séché, le piment est ensuite grillé et fumé de façon traditionnelle. Il en va de même pour les graines de coriandre. Le piment et la coriandre sont ensuite moulus ensemble. Cette étape de production du Merkén est la seule qui se soit mécanisée (toutes les autres étapes sont toujours réalisées de façon manuelle). A cette mouture est ensuite incorporé le sel (également toasté afin d’enlever le maximum d’humidité). Enfin, le Merkén est prêt à être conditionné. Dans le cas de la coopérative Ankün, il s’agit d’une mise en sachet de 20g ou en pot de 12g.

 

Le conditionnement des produits est une étape de la production particulièrement chronophage. En effet, pour mettre en sachet le Merkén, il est nécessaire de remplir le sachet avec la quantité précise de condiment, sceller le sachet, et l’étiqueter. En une heure de temps, une personne seule peut préparer 13 sachets, soit 1 sachet toutes les 5 minutes. La mise en pot est plus rapide, notamment car la quantité de Merkén est inférieure, le récipient plus facile à remplir et à sceller. Il faut ensuite poser 2 étiquettes différentes, indiquant la marque et le logo ainsi que les caractéristiques nutritives du produit.

 

En plus d’avoir un conditionnement plus rapide que le sachet, le pot est vendu à un meilleur prix et a une marge plus importante, malgré le prix proportionnellement élevé du contenant.

 

Table des prix du merkén de la Coopérative Ankün en peso chilien :

Traditionnellement, les productrices mapuche vendent individuellement le Merkén qu’elles produisent. Il s’agit d’une vente locale et directe, réalisée la plupart du temps dans la ville voisine où elles se déplacent ponctuellement pour aller vendre leurs différents produits (la ville est souvent loin, mal connectée aux communautés qui ne disposent que de chemins non-goudronnés, et les productrices qui n’ont pas de véhicules motorisés doivent prendre le bus journalier). De façon individuelle, prétendre toucher une clientèle plus éloignée via d’autres canaux de vente paraît totalement utopique pour ces productrices.

 

Cependant, un marché à fort potentiel du Merkén existe. En effet, l’industrie agroalimentaire s’est récemment emparée de ce produit pour le proposer à la vente pour de gros volumes. Si ce fait indique le potentiel en termes de marché d’un produit tel que le Merkén, cela met également en danger l’essence du produit : pour répondre à une augmentation du volume et augmenter la rentabilité, le procédé de production traditionnel, utilisé depuis des décennies par les communautés mapuche, n’est plus respecté dans le cas d’une production industrielle. Au-delà d’une perte de qualité du produit, cela risque aussi de faire baisser les prix (baisse des coûts de production) et de mettre en danger la survie de la vente du véritable Merkén Mapuche.

 

C’est à ces différents défis que tente de répondre la Coopérative Ankün. En permettant aux petites productrices de se rassembler, cela permet à la fois de dégager des volumes de Merkén plus importants (et ainsi ouvrir de nouvelles perspectives de ventes à plus grande échelle et donc des revenus plus importants pour les productrices) et d’avoir plus de poids face aux industriels présents sur le marché, tout en conservant la qualité essentielle du produit (et ainsi valoriser le patrimoine culturel et gastronomique des communautés mapuche). En outre, la coopérative permet une mise en valeur du Merkén en tant que produit gourmet.

 

Pour parvenir à cela, la faculté d’agronomie de l’Université Catholique de Temuco (UCT) a joué un rôle clé dans la construction et le développement de ce projet. Celle-ci a notamment permis de lever les fonds nécessaires à son développement auprès de différentes institutions gouvernementales. Différentes études ont ainsi été menées à l’initiative de l’université afin de pouvoir faire avancer le projet. Du matériel (pots, sachets, étiquettes, etc.), des infrastructures, des outils de communication (flyers, page internet, charte graphique, etc.) ont aussi pu être mis à la disposition des productrices. L’objectif à termes est de permettre à la coopérative de pouvoir fonctionner de façon indépendante, sans soutien de la part de l’université et d’autres organismes institutionnels. A cet objectif s’ajoute celui de l’autonomisation des productrices Mapuche afin que celles-ci puissent gérer intégralement la coopérative. Pour cela, des formations leur ont aussi été proposées. La présidente de la coopérative a ainsi pu participer à divers voyages lui permettant d’observer les « bonnes pratiques Â» mises en place dans d’autres pays.

 

L’un des projets en cours, mené à l’initiative de l’UCT, est la préparation d’un dossier technique et juridique pour postuler à une appellation d’origine pour le Merkén Mapuche. Un tel label permettrait de valoriser le savoir-faire et la tradition Mapuche, de garantir la qualité du produit, de différencier le produit sur le marché, d’assurer un prix juste, une meilleure commercialisation, une traçabilité, etc. Ce type d’appellation n’est que peu connu au Chili, contrairement à l’Europe, où plus de 6.000 produits disposent d’une telle appellation (contre seulement 1.000 aux Etats-Unis). Plusieurs critères – encore à définir - sont requis pour prétendre à une appellation d’origine : un territoire précis, un processus de production du Merkén unique, une résolution sanitaire, etc.

 

En dépit du soutien octroyé, des projets en cours et des avancements menés, la Coopérative Ankün doit faire face à divers défis, plus ou moins interconnectés. Aujourd’hui, deux ans après la naissance de la coopérative, aucune des productrices n’a encore touché de revenus issus de la vente de leurs produits. Cela peut être expliqué par le fait que très peu de ventes ont été réalisées jusqu’à présent, et que les maigres revenus déjà générés ont été utilisés pour couvrir les coûts de gestion de la coopérative. Les faibles volumes de ventes peuvent s’expliquer par le fait qu’aucune personne ne travaille à temps plein sur la commercialisation des produits (les femmes mapuche n’ont ni les capacités, ni les moyens, ni le temps aujourd’hui pour gérer cela, et l’université s’occupe de ce projet en parallèle à d’autres projets divers en cours), ou par le fait que l’absence de résolution sanitaire bloque de nombreuses ventes (la résolution sanitaire est demandée par de nombreux acheteurs). Ces deux derniers faits s’expliquent en très grande partie par le manque de ressources de la coopérative (l’embauche d’un employé et les travaux nécessaires à l’obtention d’une résolution sanitaire nécessitant des fonds).

 

Au-delà des problèmes pratiques liés au manque de ressources, des problèmes organisationnels et logistiques se doivent également d’être mentionnés. En termes d’organisation, certaines femmes sont beaucoup plus impliquées que d’autres. Cela pose la question de savoir comment les femmes seront rémunérées pour leur travail : doivent-elles être rémunérées au prorata des heures travaillées pour la coopérative, au détriment du principe d’égalité des membres d’une coopérative ? Comment impliquer davantage certaines femmes productrices ? En termes d’organisation, il est également très difficile de discerner la frontière entre ce qui est ou doit être à la charge de l’université et ce qui est ou doit être à la charge des femmes de la coopérative. Aujourd’hui, les faits montrent que les femmes Mapuche ne sont que rarement consultées au moment de prendre des décisions stratégiques, même si cela est le cas sur le papier. En termes de logistique enfin, beaucoup de choses restent à faire. En effet, toutes les productrices membres de la coopérative font parties de différentes communautés isolées, et sont donc loin les unes des autres (et avec des possibilités de déplacement limitées). Cela rend difficile la prise de décision, la répartition des tâches et augmente également les coûts de transport. A cela, s’ajoute la question de savoir où les machines et les infrastructures doivent être situées : devront-elles être installées chez l’une des membres ou bien dans un endroit plus ou moins central (comme à l’université située à Temuco par exemple), afin de respecter le principe d’égalité, au risque que celles-ci ne soient pas utilisées ?

Notre travail pour la Coopérative Ankün

Notre travail pour la Coopérative Ankün s’organise autour de deux axes principaux : la réalisation d’une vidéo de promotion du Merkén et de la coopérative et l’organisation d’un atelier de brainstorming sur un des défis auxquels elle est confrontée.

Afin de connaitre au mieux le projet et de pouvoir analyser les besoins et défis de la Coopérative Ankün, une prise de connaissance approfondie du projet et une immersion auprès des acteurs clés de l’organisation sont indispensables. Nous avons donc rencontré Gina Leonelli, Doctorante en Agronomie, professeur à la Faculté d’Agronomie de l’Université Catholique de Temuco et coordinatrice du projet de la Coopérative Ankün, qui a pu nous expliquer le projet, son histoire, son état d’avancement, ses objectifs à court, moyen et long termes, ses défis, ses difficultés, ses besoins, etc.

Afin de compléter cette première approche très intéressante, technique et professionnelle, nous avons accompagné Ginette Rivera Tralma, la présidente de la Coopérative, dans sa vie quotidienne pendant 5 jours. Les objectifs de cette immersion étaient d’avoir un point de vue différent et complémentaire à celui de Mme Leonelli, de connaitre plus précisément le produit et son processus de production et de prendre conscience de la réalité de la coopérative en participant aux tâches que les productrices effectuent tous les jours.

Cette approche nous a permis d’avoir une vision globale de la coopérative et de ses enjeux, nécessaire à l’analyse des défis et besoins, notamment au niveau de la communication, de la coopérative.

 

  • Analyse des défis et besoins en termes de communication et réalisation d’une vidéo de promotion

La Coopérative Ankün dispose déjà d’un site internet, créé par les professionnels de l’Université Catholique de Temuco. Malheureusement, payer le domaine internet du site n’est pas envisageable pour le moment vu le peu de ressource de la coopérative. Ainsi, le site n’est pas visible et utilisable à l’heure actuelle. Cependant, il nous est apparu que, dès le moment où la coopérative aurait un minimum de ressources, il serait possible de payer le domaine et de remettre en ligne un site fonctionnel. De plus, le site en attente est clair et pertinent et utilise parfaitement la charte graphique déjà bien établie de la coopérative. Il ne nous a donc pas semblé pertinent de travailler ni sur le site internet ni sur la charte graphique.

 

Au contraire, après avoir longuement discuté avec Mme Leonelli et Mme Rivera du sujet, il a semblé que l’outil de communication qui faisait le plus défaut à la coopérative aujourd’hui était une vidéo de présentation. En effet, elles sont souvent amenées à présenter le projet lors de conférences, de colloques, de festivals et autres et une vidéo de présentation leur serait grandement utile comme support de présentation. De plus, la majorité des clients potentiels internationaux, ne pouvant pas toujours se déplacer jusqu’à Temuco, réclament des dossiers de présentation. Dans ce cas, une vidéo de promotion aurait également du sens.

 

Il nous a donc semblé judicieux de travailler sur une vidéo de promotion. L’objectif de cette dernière doit être de montrer la qualité du Merkén Ankün à travers son histoire et le savoir-faire Mapuche, dans le respect de l’environnement et des petits producteurs pour trouver le soutien d’acteurs institutionnels clefs et promouvoir le produit auprès de potentiels clients. Pour répondre à cet objectif, la vidéo en espagnol sera disponible également dans une version sous-titrée en anglais. Dans la vidéo, Mme Rivera ainsi que Mme Leonelli seront interviewées afin de faire passer les messages clés voulus.

 

Un autre élément clé est que la vidéo doit pouvoir être utilisée par l’ensemble des parties prenantes de la Coopérative Ankün comme support de présentation, didactique ou commercial. Ainsi, la vidéo sera hébergée sur Vimeo (donc accessible à tous) et sera disponible sur des clés USB utilisables pour tous les membres de la Coopérative. Nous recommandons également qu’elle soit postée sur le site de la Faculté d’Agronomie de l’Université.

Vidéo réalisée par les membres du Food Sense Tour en América del Sur en partenariat avec l'association Vidéaux.

 

  • Atelier de brainstorming sur un défi prioritaire de la Coopérative Ankün

Suivant la méthode de brainstorming créatif et originale développée par MakeSense, le Hold-Up, nous avons organisé un atelier le 27 Janvier 2015 à l’occasion de l’atelier sur les Appellations d’Origine pour le Merkén Mapuche, organisé le même jour par Gina Leonelli à l’Université Catholique de Temuco.

 

Un des défis prioritaires que nous avons pu identifier au cours de notre semaine d’immersion est la nécessité de lever des fonds afin de pouvoir réaliser les investissements nécessaires pour faire les travaux indispensables aux deux fabriques de la Coopérative Ankün pour pouvoir obtenir les résolutions sanitaires. Ces dernières sont indispensables pour pouvoir commercialiser les produits à grande échelle dans un premier temps, puis pour postuler à une potentielle Appellation d’Origine, qui donnerait au Merkén Mapuche la reconnaissance et les certifications nécessaires pour toucher le plus grand nombre de consommateurs. Ces résolutions sanitaires sont donc indispensables pour la survie et le développement de la coopérative.

 

Cependant, les travaux nécessaires dans les fabriques pour respecter les normes imposées par l’organisme responsable de la résolution sanitaire sont encore nombreux. Pour les mener à bien, des fonds sont requis.

Nous avons donc décidé de nous pencher sur le défi suivant lors de notre Hold-Up : Comment lever des fonds pour réaliser les investissements nécessaires pour obtenir la résolution sanitaire pour les fabriques de la Coopérative Ankün ?

 

13 personnes, de 25 à 72 ans ont participé à l’atelier, dont des micro-productrices de Merkén, des anciens étudiants en agronomie et commerce, des professeurs de la Faculté d’Agronomies, des membres de la FIA, une avocate spécialisée dans la protection intellectuelle, des employés de collectivités locales, etc.

Parmi les solutions réfléchies et présentées par les participants au Hold-Up pour résoudre le défi proposé, nous pouvons retenir les éléments suivants :

 

  • Nécessité de faire un bilan préalable clair et écrit des investissements nécessaires pour pouvoir prétendre obtenir la résolution sanitaire

  • Les organismes institutionnels et gouvernementaux comme le Ministère de l’Agriculture, CORFO, les gouvernements régionaux, MINAGRI, SERCOTEC, FIDAP, CONADI, FOSIS, etc. sont les plus à même d’allouer des fonds importants à ce type de projet

  • Importance de lever des fonds auprès à la fois d’institutions publiques mais aussi d’entreprises privées pouvant avoir un intérêt dans le soutien et le financement de ce type de projet

  • Utilité d’embaucher un consultant externe et spécialisé afin de présenter de façon adaptée et efficace le projet de la Coopérative à de potentiels investisseurs. Le consultant devra être rémunéré par des ressources propres à la coopérative afin d’impliquer directement l’ensemble des parties prenantes de la coopérative dans la demande de la résolution sanitaire

  • Possibilité d’organiser un grand évènement autour de la Coopérative Ankün, ses avancées, l’état de ses fabriques, ses besoins, pour de potentiels investisseurs du secteur public et du secteur privé. Cet évènement devrait être festif et proposer un documentaire vidéo sur la coopérative et ses enjeux ainsi qu’une dégustation des produits de la coopérative. Toutes les parties prenantes de la coopérative devraient être présentes pour donner un visage et un aspect plus concret au projet

  • Possibilité d’organiser une campagne de crowdfunding pour lever une partie des fonds nécessaires à la réalisation des travaux indispensables, qui serait basée sur une bonne vidéo de promotion et proposerait aux contributeurs des échantillons des produits  de la coopérative en fonction du montant de leur don.

 

  • Aide opérationnelle à la mise en sachet des produits de la coopérative

Suite à une commande urgente et importante tombée pendant notre immersion dans la coopérative, nous avons aidé les membres de la coopérative à conditionner du chasku et du merkén. Aussi avons-nous pu expérimenter le temps et le travail nécessaire à la réalisation de cette tâche. Pour mettre en sachet le merkén par exemple, il est nécessaire de peser le merkén (20g par sachet), sceller le sachet et l’étiqueter. Afin de réaliser les 400 sachets de merkén de la commande, 10 heures de travail (à trois) nous ont été nécessaires. De cette expérience, nous avons pu effectuer un calcul du temps de travail nécessaire au conditionnement pour une personne (cf. partie analyse). La pénibilité de ce travail est également à relever, le merkén étant un produit à base de piment, les yeux piquent très rapidement, et un masque de travail est nécessaire.

 

Nos recommandations

  • Embaucher une personne à plein temps chargée de la commercialisation des produits et de la communication

Afin de répondre au premier challenge lié aux faibles volumes de vente jusqu’alors effectués par la coopérative, une personne à plein temps pourrait être nommée afin de se charger de la commercialisation des produits. Cette tâche requiert une certaine expertise, que ni les membres de la coopérative Ankün ni Gina Leonelli, Docteur en Agronomie à l’Université Catholique de Temuco et coordinatrice de la coopérative, n’ont aujourd’hui. La commercialisation du produit est pourtant une priorité, l’objectif de la coopérative étant de pouvoir trouver des débouchés de ventes aux produits traditionnels mapuche. Nommer une personne à la charge de cette tâche permettrait aux membres et à l’université de se concentrer sur les tâches essentielles en amont (culture, production du Merkén, organisation, etc.).

 

  • Mettre à contribution les élèves de l’université

 Le problème du manque de ressources financières rend difficile une perspective d’embauche. En l’absence de nouveaux fonds ou de bénévolat, l’option intéressante qui reste à explorer est celle de mettre à contribution les compétences des élèves de la faculté de commerce de l’UCT. Cela pourrait être simple à mettre en place en raison des liens déjà existants entre la coopérative Ankün et l’université.

 

Ce qui reste néanmoins plus compliqué est de pouvoir assurer une continuité dans la gestion de cette tâche, les étudiants ne restant à l’université que pour une durée déterminée. En outre, la charge de travail que cela représente pourrait difficilement être assurée par un seul étudiant. Mettre en place un projet annuel suivi par un groupe d’étudiants de la faculté de commerce de l’UCT apparaît ainsi comme l’option la plus intéressante à mettre en place. Ce travail pourrait entrer dans le cadre du programme de cours, ce qui assurerait la réalisation de la tâche (contrôle par les professeurs du programme). Un tel projet concret aurait également l’avantage d’enrichir et motiver les étudiants, en leur permettant d’appliquer directement et de façon pratique les connaissances théoriques acquises.

 

  • Mettre l’accent sur la capacitation et la prise d’autonomie des productrices à travers un programme de formation mis en place par l’Université Catholique de Temuco

Il serait intéressant que le rôle de l’Université soit essentiellement orienté vers la capacitation et la prise d’autonomie des productrices, notamment en renforçant les programmes de formation déjà mis en place pour celles-ci. Les formations pourraient traiter des tâches que les membres de la coopérative Ankün doivent mener et dont il est important que les membres de la coopérative aient des notions. Par exemple, des formations sur la gestion, la comptabilité, la commercialisation, le marketing et la communication.

 

Aujourd’hui, les femmes de la coopérative n’ont ni les capacités, ni l’envie de réaliser ces tâches. Pourtant, l’objectif à termes est que les productrices puissent faire fonctionner la coopérative de manière indépendante, sans l’aide de l’université. Il apparaît donc comme essentiel de pouvoir offrir aux membres les clés de connaissance qui leur permettront de réaliser cela. Un programme de formation sur une année pourrait ainsi être élaboré par l’université, en mettant à contribution les professeurs de l’université qui seraient intéressés pour donner quelques heures de leur temps dans l’année pour transmettre leur savoir aux femmes participantes. La mise en place d’un tel programme permettrait de renforcer le rôle de soutien de l’université.

 

Par ailleurs, il semble important d’insister sur le fait que le rôle de l’université ne doit pas dépasser celui de soutien apporté à la coopérative Ankün (formations, matériel, communication, etc.). Tout l’aspect décisionnel se doit de rester entre les mains des productrices de la coopérative, et notamment du comité directeur. Par exemple, le container acquis par l’université pour la production de Merkén fait aujourd’hui débat, à la fois au sein de l’université et de la coopérative, quant au choix de sa localisation. La décision de savoir où ce container sera installé devrait être pris conjointement par les membres de la coopérative, l’université n’ayant pas là de pouvoir décisionnel, son rôle s’arrêtant à celui du conseil.

 

  • Mettre en place un nouveau modèle de rémunération juste et efficace des membres de la coopérative

Selon les statuts actuels de la coopérative, les bénéfices générés par les ventes de la coopérative et non réinvestis dans le développement de la coopérative sont répartis équitablement entre les membres. Cependant, le travail et l’implication de ces derniers sont très variables. Alors que certaines productrices n’ont encore jamais participé directement à la production du Merkén de la coopérative, d’autres ont fourni une partie du piment nécessaire à la fabrication du produit, d’autres encore s’occupent de la production intégrale du Merkén et ont des responsabilités dans le comité directeur de la coopérative, comme c’est le cas de Mme Rivera. Ainsi, il ne semble pas vraiment juste que le bénéfice dégagé soit distribué équitablement entre tous les membres, sans prendre en compte leur implication dans la production.

 

Il semblerait opportun de rémunérer les productrices fournissant le piment à la coopérative en le leur achetant au prix du marché, leur permettant d’avoir un revenu en échange de leur culture ; de rémunérer au prix juste les membres procédant à la fabrication du Merkén ; puis de redistribuer le bénéfice final généré par la vente des produits de manière équitable à tous les membres.

 

  • Combiner financements publics et privés

Jusqu’à présent, la Coopérative Ankün a pu se développer essentiellement grâce à des financements publics obtenus à travers des programmes et des études obtenus par l’Université auprès d’institutions publiques et gouvernementales comme la FAO, le Ministère de l’Agriculture, CORFO, FIA, entre autres. Ces aides restent indispensables mais ne peuvent être la source majoritaire de financement de la coopérative, au risque de créer une situation d’assistance et de dépendance.

Pour éviter cette situation, il semble judicieux de chercher à combiner à la fois des financements publics et privés. Il s’agirait de démarcher des entreprises privées pouvant avoir un intérêt dans le financement et le soutien du projet de la coopérative. Il pourrait s’agir de chaînes de supermarché, de chaînes de restaurants, d’entreprises agroalimentaires, etc.

 

  • Réaliser une campagne de crowdfunding pour lever des fonds

Pour résoudre le problème récurrent du manque de fonds au sein de la coopérative Ankün, la solution de mise en place d’une campagne de financement participatif pourrait également être intéressante dans le cas de petits montants. En effet, il s’agit, pour un projet donné, de permettre à tous de contribuer financièrement à son échelle. En échange d’un don au projet sur la plateforme, une personne pourra obtenir une récompense symbolique (proportionnellement au montant de son don). Une campagne de crowdfunding peut par exemple être réalisée sur la plateforme http://daleimpulso.com/ ou sur http://idea.me/. Dans le cas de la coopérative Ankün, elle pourrait être organisée sur deux mois, afin de pouvoir lever une partie des fonds nécessaires à la réalisation des travaux indispensables pour pouvoir obtenir la résolution sanitaire par exemple,  coût d’hébergement de la page internet de la coopérative. Une campagne de crowdfunding réussie implique bien sûr un suivi important, notamment en termes de communication.

 

  • Mettre en place une réelle stratégie de communication basée sur la page internet

En termes de communication, il serait très intéressant de pouvoir rendre opérationnelle la page internet existante, à la fois pour pouvoir donner de la visibilité au projet (pour les partenaires institutionnels, les potentiels clients, l’université, les membres de la coopérative) et également pouvoir héberger toutes les informations disponibles et le travail réalisé par la coopérative (informations sur les produits commercialisés, les prix, les membres de la coopérative, etc.). La charte graphique créée est à conserver, et à exploiter au maximum. Des photos et vidéos pourraient également alimenter la page, et donner un contenu humain et émotionnel à ce projet (belles images, empruntes de tradition, musique et couleurs qu’il est important d’exploiter). Ces supports visuels pourraient également servir de support dans la présentation de la Coopérative lors de feria, de conférences, etc. A plus long terme, une présence sur les réseaux sociaux serait aussi souhaitable mais cela ne devra venir que dans un second temps.

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